Bibliothèque : trop de volumes et pas assez de livres. [Azalée Chêne & Alphonse Feldmann]

Azalée était rentrée dans la bibliothèque qui se trouvait être relativement vide, quelques minutes plus tôt. Elle s'était directement dirigé vers la section histoire, à la recherche d'un livre bien précis. Ce n'était pas pour les cours, mais pour sa culture générale et par conséquence un peu pour les cours quand même. Après avoir trouvé ce qu'elle convoitait, elle s'assit à une table, seule, le plus éloignée de la porte d'entrée (et de sortie) et brancha ses écouteurs à son MP3 vert pomme où elle mit Love them de André Rieu, dans Roméo et Juliette, son roman, sa pièce de théâtre, mais aussi sa comédie musicale et son film favoris. Une histoire remplie d'amour comme elle les aime. Elle ouvrit la première page du bouquin et commença sa lecture tout en prenant des notes sur son petit calepin. Après une trentaine de minutes, elle se rendit compte qu'elle était passé directement de la page 35 à 38. Elle poussa un long et interminable soupir et retira ses écouteurs qu'elle posa sur la table.

- Ce n'est pas possible ça... Murmura-t-elle pour elle-même. Qui est le crétin qui l'a lu en dernier...?

Elle ouvrit la dernière page et fronça les sourcils en voyant le prénom du dernier à l'avoir emprunté. C'était qui, ce Feldmann ?

Al poussa la porte de la bibliothèque. Un peu trop fort apparemment puisqu'elles claquèrent contre le mur de pierre et plusieurs têtes furieuses le fusillèrent du regard alors qu'il s'excusait d'un geste de la main. Il soupira nerveusement et réajusta sa chemise sur ses épaules. D'après Nawel, c'est là qu'elle devait se trouver. Encore fallait-il que son amie ne se soit pas fichu de lui... Al balaya cette idée. Être optimiste. Le jeune homme promena son regard sur les pensionnaires attablés au centre de la salle. Pas de tête blonde en vue. À moins que... Al la repéra soudain à la table la plus éloignée de la porte, dans le coin. Elle semblait plongée dans un livre, et donc ne pas avoir remarqué son entrée... bruyante. Al inspira profondément et se dirigea droit vers elle, esquivant élèves et chaises au passage. Arrivé à sa hauteur, le jeune homme prit son courage à deux mains et se lança :

- Hey Azalée ! Tu vas bien ?

Ouille. Il s'auto-maudissait pour cette entrée en matière pire que pitoyable. Et son visage se décomposa un peu plus devant celui, abasourdi, de la jeune fille.

- Tu ne me connais pas... lâcha-t-il lentement en essayant de conserver un semblant de dignité.

- Hey Azalée ! Tu vas bien ?

La jeune fille écarquilla les yeux et haussa les sourcils. Elle rêvait ou elle avait bel et bien entendu son prénom ? C'était bien la première fois que quelqu'un lui parlait et surtout que quelqu'un connaissait qui elle était. Elle releva la tête le plus lentement possible et découvrit un charmant jeune homme qui se tenait à côté d'elle, a à peine quelques centimètres. Elle lui adressa un petit regard interrogateur, car elle ignorait qui il était.

- Tu ne me connais pas... lâcha-t-il lentement en essayant de conserver un semblant de dignité.

- Non, mais je devrais ?

Azalée le regarda avec un petit air désolé. Elle avait parlé trop vite. Un tout petit peu trop vite et sa réaction ou plutôt sa question était stupide et légèrement antisociable. Elle reprit ses esprits et continua, un peu déboussolée :

- Ce n'est pas ce que je voulais dire, excuse-moi. C'est...surprenant que tu me connaisses en fait. Généralement, on ne me prête pas tellement d'attention. Alors, euh... Tu es ?

- Non, mais je devrais ?

Re ouille. Ce n'était pas vraiment la réaction à laquelle Al s'était attendu. En fait s'il avait pu se frapper la tête contre la table sans avoir l'air parfaitement ridicule et donc aggraver son cas, il l'aurait fait volontiers. Heureusement, Azalée reprit la parole et lui évita une situation des plus embarrassantes.

- Ce n'est pas ce que je voulais dire, excuse-moi. C'est... surprenant que tu me connaisses en fait. Généralement, on ne me prête pas tellement d'attention. Alors, euh... Tu es ?

"Fou de toi depuis deux ans" ne paraissant pas une réponse adéquate, Al se secoua pour remettre ses idées en place et penser à autre chose qu'à ces magnifiques yeux bleus. Comment ne pas prêter attention à ces yeux-là ? Mystère...

- Al. Appelle-moi Al, sourit-il en prenant place sur la chaise en face d'Azalée. En fait on est dans la même classe de maths, d'histoire, de chimie et de français... Depuis cinq mois.

- Al. Appelle-moi Al, sourit-il en prenant place sur la chaise en face d'elle. En fait on est dans la même classe de maths, d'histoire, de chimie et de français... Depuis cinq mois.

- Oh... Enchantée, Al.

Comme se sentir encore plus honteuse en cinq secondes ? Ne jamais avoir remarqué un de ses camarades de classe ni même savoir son prénom.
Bien jouée Azalée, tu mériterais la palme d'or de la fille la plus ridicule, pensa-t-elle.

- Tu dois vraiment me prendre pour une idiote à ne pas savoir ça. C'est même gênant, pour tout te dire...

Puis, la jeune fille eut une illumination. Si elle se trouvait dans un dessin-animé, une petite ampoule aurait sans doute apparu au-dessus de sa tête et se serait aussitôt éclairé. Elle lui montra le livre à aux pages 35 et 38 et lui posa la question dont elle cherchait une réponse tout à l'heure.

- C'est bien toi Feldmann ? Donc est-ce que tu sais si les pages manquaient déjà quand tu as emprunté ce bouquin il y a deux semaines ? (Elle marqua un petit temps d'arrêt) D'ailleurs, ce n'est pas toi qui traîne avec la furie ?

- Oh... Enchantée, Al.

Le jeune homme la gratifia d'un grand sourire. Alleluia ! Il avait réussi à établir le dialogue. Le premier en deux ans... Félicitation Alphonse, tu te surpasses. Tout de même, il n'était pas peu fier de son "exploit" et sentit une vague de bien-être grandir en lui. Il s'autorisa même à se détendre un peu.

- Tu dois vraiment me prendre pour une idiote à ne pas savoir ça. C'est même gênant, pour tout te dire...

- C'est vrai que pour le coup je suis vexé, je pensais être plus populaire que ça, rétorqua-t-il avec un sourire en coin.

- C'est bien toi Feldmann ? Donc est-ce que tu sais si les pages manquaient déjà quand tu as emprunté ce bouquin il y a deux semaines ?

Al baissa les yeux vers le livre d'Azalée. En effet, une page manquait où elle le lui indiquait. Le jeune homme fronça les sourcils avec étonnement. Quand il l'avait lu, il y a quelques semaines de cela, le livre était intact. Mais Azalée ne lui laissa pas le temps de répondre et lui posa une nouvelle question :

- (...) D'ailleurs, ce n'est pas toi qui traîne avec la furie ?

Al émit un petit rire.

- Tu veux parler de Nawel ? Si, c'est moi. Un peu maso sur les bords, hein ?

Nawel pouvait toujours courir pour qu'il la défende de ce côté-là. Le nombre de fois où il avait vainement essayé de la faire changer d'attitude, voilà qu'elle en payait les fruits. Encore que, pas sûr que l'opinion des autres pensionnaires affecte particulièrement son amie...

- Bref, pour en revenir à ton problème de livre, ce n'est pas moi qui l'ais mutilé. Et il avait encore toutes ses pages lorsque je l'ai emprunté.

- Tu veux parler de Nawel ? Si, c'est moi. Un peu maso sur les bords, hein ?

Aza émit un petit rire et hocha la tête en signe d'acquisition. Pour être maso, ça, il fallait l'être. D'après ce qu'elle avait entendu dire, cette fille était la réincarnation du diable sur terre, rien que ça. Par chance, elle n'avait jamais eu de problèmes avec elle et avait échappé de justesse au bizutage qu'elle faisait subir aux petits nouveaux.

- Bref, pour en revenir à ton problème de livre, ce n'est pas moi qui l'ais mutilé. Et il avait encore toutes ses pages lorsque je l'ai emprunté.

La jeune fille laissa de côté ses pensées pour Nawel et reporta son regard sur Al en souriant. Elle aimait bien son petit humour décalé qui se faisait de plus en plus rare chez les garçons de nos jours. Elle referma le livre et soupira.

- Personne ne l'a prit après toi, c'est bizarre. Quelqu'un se serait amusé à lui enlever des pages devant la bibliothécaire ? Ca en relève presque du suicide, cette vieille chouette est aigrie comme ce n'est pas permis. Mais peut-être que pour régler mon problème, tu te souviens du contenu de ces pages ?

- Personne ne l'a prit après toi, c'est bizarre. Quelqu'un se serait amusé à lui enlever des pages devant la bibliothécaire ? Ça en relève presque du suicide, cette vieille chouette est aigrie comme ce n'est pas permis. Mais peut-être que pour régler mon problème, tu te souviens du contenu de ces pages ?

- Sûrement quelqu'un d'accro aux... créatures mythologiques de la Grèce antique ? supposa Al en déchiffrant le titre à l'envers. Quelqu'un qui ne pouvait pas se contenter de simplement emprunter ce bouquin... Ou qui avait carrément trop peur de la bibliothécaire pour le faire. Ça se tient.

Al pouvait parfaitement imaginer qu'on puisse être terrifié par cette bonne femme, il suffisait de voir comment elle faisait régner l'ordre et le silence dans sa bibliothèque. On pourrait y entendre une mouche voler. Et gare à celui qui troublerait le calme ambiant. Al frissonna à cette idée et reporta son attention sur Azalée.

- Humm, si je me souviens bien, cette page parlait des hippogriffes du Mozambique, et il y avait même une tache de café dans la marge du troisième paragraphe, ironisa-t-il. Non, je ne me rappelle pas de cette page, désolé.

- Humm, si je me souviens bien, cette page parlait des hippogriffes du Mozambique, et il y avait même une tache de café dans la marge du troisième paragraphe, ironisa-t-il. Non, je ne me rappelle pas de cette page, désolé.

Azalée sourit de nouveau. En quelques minutes, il avait réussi à lui faire battre son record de sourire en vingt-quatre heures et s'il continuait ainsi, il allait arriver à lui faire un claquage des lèvres. Mais au moins, il marquait de bons points. Et dieu sait qu'avec elle, il en fallait beaucoup pour arriver à devenir son ami. Antisociale jusqu'au bout... ou presque.

- Pourquoi je me doutais que tu allais utiliser l'ironie ? Demanda-t-elle en plongeant ses yeux dans les siens. C'est une seconde nature chez toi, n'est-ce pas ?


Elle posa le bouquin sur la pile de livre à côté d'elle, déjà haute de vingt centimètres au moins et reporta son attention sur lui. Finalement, comme dit l'expression, il tombait à pic !

- Tu as l'air de t'y connaître en créature mythologique, ça ne te dérangerait pas de m'aider ? J'ai pas mal de lacunes dans la matière et ça serait chouette...

- Pourquoi je me doutais que tu allais utiliser l'ironie ? demanda-t-elle en plongeant ses yeux dans les siens. C'est une seconde nature chez toi, n'est-ce pas ?

- Disons plutôt mal seule arme pour survivre dans ce monde de brutes, répondit Al en souriant.

Par tous les dieux, qu'est-ce qu'il se sentait bien en ce moment ! Il avait enfin pu approcher et entamer une discussion avec la fille de ses rêves, et cette même fille ne l'avait pas (encore) envoyé balader. Al plongea dans l'océan de ses yeux. Un bleu tellement profond qu'il pourrait s'y perdre, s'y noyer même, pour filer la métaphore... Azalée reprit la parole et lui fit reprendre ses esprits.

- Tu as l'air de t'y connaître en créature mythologique, ça ne te dérangerait pas de m'aider ? J'ai pas mal de lacunes dans la matière et ça serait chouette...

Le visage d'Al se fendit d'un large sourire. Pour une fois que les jeux en lignes qu'il affectionnait lui étaient utiles, qui l'eût cru ?

- Alors là, tu es tombée sur la bonne personne ! s'exclama-t-il. En quoi puis-je avoir l'honneur de te venir en
aide ?

Devant tant de bonheur, Azalée, par simple réflexe, ne put s'empêcher de plaquer un doigt sur sa bouche pour le faire taire. Ils étaient dans une bibliothèque et vu qui la tenait, elle n'avait pas très envie de se faire remarquer et encore moins crier dessus. Donc, en conséquence de son acte, elle était presque allongée sur la table. Elle se rassit, un peu gênée et passa une main dans ses cheveux.

- Hum... Evite de montrer ta joie à voix haute, j'aimerais pouvoir rester ici avec toi...

Gaffe du siècle.

- Oui, parce que c'est plus calme pour parler, tu vois ?

Rattrapage du siècle.

- Bref. Tu n'as pas intérêt à te moquer de moi... Donc, en fait, j'ai acheté un jeu qui s'appelle Gods and Heroes : Rome Rising et dont le but et de tuer des créatures mythologiques... Et pour appartenir à un groupe d'autres joueurs, ils demandent souvent des questions sur les créatures et comme tu t'en doutes, je n'y connais absolument rien.

À peine avait-il finit sa phrase qu'Azalée se pencha vers lui et lui plaqua son index sur les lèvres, ce qui eût pour effet de le faire loucher. Puis rougir, lorsqu'il se rendit compte que cette position lui donnait une vue plongeante parfaite sur le décolleté de la jeune fille. Al détourna prestement les yeux vers son visage. Après ce qui lui sembla une éternité, Azalée se rassit sur sa chaise, avec un air très gênée.

- Hum... Évite de montrer ta joie à voix haute, j'aimerais pouvoir rester ici avec toi... Oui, parce que c'est plus calme pour parler, tu vois ?

Oui, il voyait très bien et cette décision ne le dérangeait pas du tout du tout, bien au contraire ! En fait, Al aurait échangé sa place pour rien au monde.

- Bref. Tu n'as pas intérêt à te moquer de moi... Donc, en fait, j'ai acheté un jeu qui s'appelle Gods and Heroes : Rome Rising et dont le but et de tuer des créatures mythologiques... Et pour appartenir à un groupe d'autres joueurs, ils demandent souvent des questions sur les créatures et comme tu t'en doutes, je n'y connais absolument rien.

- Tu-tu joues à God and Heroes ?! Moi aussi ! s'exclama Al avec des étoiles dans les yeux.

Se rendant compte du volume sonore dont il venait de faire preuve, il jeta un coup d'oeil furtif en direction de la bibliothécaire. Heureusement, elle était occupée avec un pensionnaire qui voulait emprunter un livre. Al se retourna vers Azalée, un sourire jusqu'aux oreilles collé au visage.

- J'aurais jamais imaginé que tu joues à des jeux en lignes, c'est... incroyable. Et je vais t'aider bien sûr, sans aucun problème ! En fait je peux même t'intégrer dans ma guilde, ce sera plus rapide, lui proposa-t-il.

- Peut-être parce que tu me voyais plus comme une jeune fille studieuse qui passe ses journées entières le nez fourré dans des livres ou à prendre des cours de musiques ? C'est exactement moi, mais j'ai eu envie de tester autres choses et même si je débute, je dois dire que ça me plait plutôt bien.

Elle le regarda un peu plus intensément. Il avait de magnifique yeux couleurs noisettes. Bien sûr, la plupart des gens trouveront ça banale, mais elle, elle adorait cette couleur, peut-être parce que c'est également son fruit préféré, aller savoir. Puis se fut autre chose qui retint son attention, le bonnet en laine qu'il portait sur sa tête. En hiver, ça ne l'aurait pas choqué, mais en plein mois de mai, fallait avouer que c'était un tantinet bizarre.

- Tu portes des bonnets toute l'année ? Ca te va magnifiquement bien, mais vu la chaleur qu'il fait dehors, c'est assez étonnant.

Puis elle reprit, sans attendre de réponse particulière, même si elle était fort bien intriguée.

- Et pour ta guilde, même si ça me ferait très plaisir d'y être accepté, je voudrai quand même passer les tests et pour passer les tests, il faut m'apprendre. Je pourrais t'enlever un peu de ton masochisme, dit-elle dans un sourire un peu ironique en repensant à la petite conversation sur Nawel et lui, en passant quelques heures avec moi, qu'en dis-tu ?

- Tu portes des bonnets toute l'année ? Ça te va magnifiquement bien, mais vu la chaleur qu'il fait dehors, c'est assez étonnant. Et pour ta guilde, même si ça me ferait très plaisir d'y être acceptée, je voudrai quand même passer les tests et pour passer les tests, il faut m'apprendre. Je pourrais t'enlever un peu de ton masochisme, en passant quelques heures avec moi, qu'en dis-tu ?

Al lui répondit d'un grand sourire. Non seulement Azalée ne l'avais pas snobé comme il se l'était imaginé, mais en plus elle souhaitait passer plus de temps en sa compagnie. Sa bonne étoile devait veiller sur lui en ce moment, c'était le plus beau jour de sa vie. Note personnelle : penser à jouer un ticket de loto ce soir, on ne savait jamais.

- Loin de moi l'idée de t'ouvrir grand la porte de la guilde aussi facilement, tu passeras les tests comme tout le monde. Ce sera donc avec plaisir que je deviendrai ton Yoda spécialiste en créatures mythologiques. Et j'essaierai même d'être un peu objectif, rétorqua Al en posant ses coudes sur la table. Et concernant mon bonnet, c'est complètement une question de look. Ça me donne un petit côté hipster, tu trouves pas ?

Malgré les apparences, Al tentait de suivre un minimum les tendances vestimentaires. C'était aussi une question de survie finalement : autrement, il se serait fait directement catalogué parmi les geek matheux associables.

- Serait-ce à cause de moi que tu vas seulement "essayer" d'être objectif ? Je prends très bien les critiques tu sais. Il faut juste savoir être un minimum indulgent avec moi. Dit-elle en souriant. Et être très patient.

A vrai dire, il n'aurait pas besoin d'être patient. Azalée avait la faculté de tout retenir et vite. Ce qui lui avait permis d'apprendre des poésies mais aussi des pièces de théâtre rapidement sans trop d'efforts particuliers. Mais pour le simple plaisir de passer plus de temps que prévu avec lui, elle allait bien se garder de lui dire qu'au bout de deux ou trois fois, elle serait devenu incollable sur tout ce qui était créature et mythologique.
Pour répondre à sa question sur son style vestimentaire, elle le regarda de nouveau, l'analysant presque dans les moindres détails, comme un scanner aurait pu le faire. C'est vrai que son look n'était pas loin du look hipster, à un petit détail près.

- Du moment que tu ne portes pas la barbe, tu as un magnifique côté hipster. Mais sincèrement, je dirais que tu as plutôt un petit côté garçon qui pourrait me faire craquer.

- Du moment que tu ne portes pas la barbe, tu as un magnifique côté hipster. Mais sincèrement, je dirais que tu as plutôt un petit côté garçon qui pourrait me faire craquer.

Al cligna plusieurs fois des yeux. Ok, il était sûrement en pleine hallucination. La fille qui le faisait rêver depuis deux ans venait de lui faire une avance grosse comme une maison, incroyable ! Complètement soufflé, Al ne sut que répondre de prime abord. Finalement, il inspira et sourit à Azalée.

- Et encore, tu ne me connais que depuis vingt minutes. Mais t'en fais pas, la barbe, c'est pas du tout mon truc.

Al consulta sa montre.

- Il nous reste une heure et des brouettes avant le déjeuner, ça te dit de commencer ta première leçon ? proposa-t-il en désignant les ordinateurs en veille de la table voisine. On ne pourra pas mettre de son mais ce sera déjà ça de pris. Et je te promets d'être aussi patient que possible, ajouta Al avec un sourire.

Azalée tourna la tête en direction des ordinateurs puis regarda de nouveau Al. Elle n'avait pas pu jouer suffisamment de temps pour connaître un minimum le jeu et l'idée de se taper la honte de l'année auprès du seul garçon qui lui avait parlé en deux ans la refroidissait un peu. Elle ravala sa salive et lui fit un petit sourire crispé.

- Tu es sûr que ça ne va pas dérager Nawel que tu restes jusqu'au déjeuner avec moi ? J'ai crus comprendre qu'elle était assez possessive comme fille...

Elle se leva, prit son sac à dos qu'elle mit sur une épaule et prit sa pile de livres dans les bras avant de le rejoindre et de se placer à ses côtés.

- Au pire, elle pourra toujours venir s'énerver ici, elle se fera gentiment renvoyer d'où elle vient. Dit-elle en s'imaginant le concept. Je crois que je vais aimer la bibliothécaire uniquement pour ça.

Elle se dirigea vers un des ordinateurs et s'installa sur la chaise avant de se tourner vers Al.

- On peut demander des casques, il me semble. On pourra sûrement avoir le son comme ça. Qu'en dis-tu ?

- Tu es sûr que ça ne va pas dérager Nawel que tu restes jusqu'au déjeuner avec moi ? J'ai crus comprendre qu'elle était assez possessive comme fille... Au pire, elle pourra toujours venir s'énerver ici, elle se fera gentiment renvoyer d'où elle vient. Je crois que je vais aimer la bibliothécaire uniquement pour ça.

Al émit un petit rire. Plus possessive que Nawel, tu meurs, songea-t-il en se remémorant le mal qu'il avait eu pour la quitter et venir ici. Surtout qu'il l'avait laissé en compagnie de Juliette. Elle allait lui en vouloir, c'était certain. Avec un peu de chance, il s'en sortirait avec une petite bosse...

- Baah, elle crisera pendant une heure ou deux, ce ne sera pas la première fois. Mais elle s'en remettra !

... Enfin j'espère.
Al se leva de sa chaise à la suite d'Azalée et se dirigea vers les ordinateurs.

- On peut demander des casques, il me semble. On pourra sûrement avoir le son comme ça. Qu'en dis-tu ? lui proposa Azalée.

- Bonne idée, acquiesça Al. Je vais les chercher.

Il se dirigea donc vers la bibliothécaire, maintenant plongée dans l'un de ses dossiers, et toussota pour qu'elle relève la tête vers lui. Al la salua poliment et lui demanda s'il pouvait emprunter deux casques d'écoute munis de micros. La bibliothécaire lui jeta un coup d’œil sceptique mais finalement, ne voyant rien à lui reprocher, accéda à sa demande. Le jeune homme la remercia puis tourna les talons pour rejoindre Azalée.

- Voilà voilà ! annonça-t-il en lui tendant un des casques.

En regardant Azalée enfiler l'appareil, il ne put s'empêcher de la dévisager.

- Tu sais, je n'aurais jamais pensé que tu t'intéresses à ces jeux en ligne. Je t'avoue que si tu avais été passionnée de yoga, j'aurais eu beaucoup moins de marge de manœuvre pour t'apprendre quelque chose.

Azalée récupéra le casque en le remerciant et le positionna sur sa tête. Elle régla ensuite le micro à la hauteur de sa bouche et ne put s'empêcher de s'imaginer en tant que pilote d'avion. Elle rêvait de monter à bord un jour. Elle ferma les yeux pour laisser ses pensées de côté et se tourna vers Al qui lui parlait.

- Tu sais, je n'aurais jamais pensé que tu t'intéresses à ces jeux en ligne. Je t'avoue que si tu avais été passionnée de yoga, j'aurais eu beaucoup moins de marge de manœuvre pour t'apprendre quelque chose.

- J'ai déjà fait du yoga, mais ce n'était pas assez actif. Je crois que le magazine Yogumes n'est pas fait pour moi. Dit-elle en faisant une très grosse allusion à son comique préféré. Et ne cherche pas à comprendre le pourquoi du comment. Dis-toi que c'est ton jour de chance.  

Elle se mit face à l'écran et lança le jeu qui était déjà installé sur l'ordinateur. Sans doute par le club de geek de l'orphelinat dont Al devait sans doute faire partie, elle en mettait sa main à couper. Elle jeta un petit coup d'œil à son voisin de table en essayant de s'imaginer à quoi pouvait bien ressembler son personnage dans le jeu. Ressemblant ou pas du tout ?

- J'ai déjà fait du yoga, mais ce n'était pas assez actif. Je crois que le magazine Yogumes n'est pas fait pour moi. Et ne cherche pas à comprendre le pourquoi du comment. Dis-toi que c'est ton jour de chance.  

Al rit en comprenant la référence à Gad Elmaleh. Lui aussi avait beaucoup aimé ce sketch. Comme tous les autres de l'humoriste d'ailleurs. Al nota avec joie qu'Azalée et lui avaient les mêmes goûts humoristiques.
Le jeune homme imita Azalée et positionna le casque sur ses oreilles, ajusta le micro et lança le jeu. Tandis que le générique de début commençait, Al songea avec horreur qu'il devrait faire part de son pseudo. Pseudo qui paraissait cool au milieu de mecs geeks, nettement moins en compagnie d'une jolie fille. Gloups. Al soupira discrètement en sélectionnant son personnage, un homme tout de noir vêtu, avec une coupe de saiyan brun et une ribambelle de poignards, dagues et autres shurikens accrochés un peu partout.

- Ok, je suis connecté. À toi, je t'attends dans la ville de départ.

- Ok, je suis connecté. À toi, je t'attends dans la ville de départ.

La jeune fille hocha la tête et s'exécuta. Elle cliqua sur son personnage, une femme au visage angélique avec deux longues couettes blondes descendent jusqu'aux genoux, des yeux bleus mer et accoutrée d'une robe bleue nuit ornée de quelques dorures et surtout doté d'un magnifique décolleté. Et c'était la robe qui laissait le moins voir certaines parties intimes. Concernant les armes, elle avait choisi ce qui lui semblait le plus approprié, la magie. Elle avait donc toute la panoplie du parfait sorcier, sauf la baguette magique et le chapeau pointu. Son équipement se contentait d'une sacoche remplie de toutes sortes d'ingrédient, un grimoire et un sceptre formant une lune avec une étoile à l'intérieur.

- C'est bon, je suis là...

Son personnage venait d'apparaître sur l'écran, tout comme la ville de départ. Elle soupira devant le nombre incroyable de joueurs qui se tenaient autour d'elle. C'était assez terrorisant. Elle observa chaque joueur un à un, du moins commença à observer, en espérant deviner qui il était, mais elle laissa bien vite tomber.

- Hum... Ton pseudo, c'est quoi ?

Tandis qu'Azalée se connectait, le perso d'Al se matérialisait parmi la foule. Il se connectait quasiment tous les jours, cependant il était toujours autant impressionné par le nombre de joueurs présents à toutes heures du jour et de la nuit.

- Hum... Ton pseudo, c'est quoi ?

Al grimaça. Le moment fatidique était arrivé. Il soupira puis se lança, avec un petit sourire résigné.

- Hannib'Al. Et te moque pas hein, j'te sens venir à des kilomètres, la prévint-il en levant un l'index.

Quand il l'avait adopté quelques années plus tôt, ce pseudo lui avait paru vraiment classe, à la fois impressionnant et personnel. Maintenant il paraissait plutôt puérile et pas du tout original. Al soupira, son plan drague n'était pas encore tout à fait au point, certains détails laissaient à désirer.

- Bref, mon perso ressemble à un espion à l'air pas très net, habillé en noir. Dis-moi quand tu m'as retrouvé.

- Hannib'Al. Et te moque pas hein, j'te sens venir à des kilomètres, bref, mon perso ressemble à un espion à l'air pas très net, habillé en noir. Dis-moi quand tu m'as retrouvé.

Azalée étouffa un rire derrière ses mains, mais ses yeux qui brillaient de moqueries la trompaient facilement. Tout ce qu'elle avait en tête, c'était le psychopathe des livres où il apparaissait et qu'elle avait lu plus d'une dizaine de fois et entre nous, Al ne ressemblait absolument pas à ce psychopathe.

- Belle trouvaille, dit-elle entre deux gloussements, ou plutôt joli jeu de mot.

Elle se retourna vers son écran et survola à l'aide de la souris le forum de la ville de départ. Elle fit rapprocher son personnage et fini par le trouver. Il était pas loin d'un arbre, un peu à l'écart de la foule, ce qui l'arrangeait plutôt bien. Elle se mit en face de lui et à l'aide de la discussion instantanée du jeu lui envoya un message : Je t'ai trouvé !

- T'es dix fois plus flippant dans le jeu qu'en vrai... Et d'ailleurs, tu comptes me dire ton véritable prénom ou pas encore ? Parce que je suppose qu'Al ce n'est qu'un surnom...

- Belle trouvaille, dit-elle entre deux gloussements, ou plutôt joli jeu de mot.

Al lâcha un petit rire après cette moquerie à peine voilée. Il reporta son regard vers l'écran. Apparemment Azalée venait de le trouver, comme le montrait son message. Son perso représentait une magicienne affublée de deux longues couettes, habillée en bleu et aux atouts... avantageux. Aucun doute ne subsistait sur ceux à qui les créateurs de jeux destinaient leurs produits, songea Al avec un sourire en coin.

- T'es dix fois plus flippant dans le jeu qu'en vrai... Et d'ailleurs, tu comptes me dire ton véritable prénom ou pas encore ? Parce que je suppose qu'Al ce n'est qu'un surnom...

Al ne détourna pas les yeux de l'écran. Peu de gens à l'orphelinat connaissaient son véritable prénom, étant donné qu'il avait prit grand soin à le leur cacher. Ce prénom. Il n'était pas seulement vieux et dépassé, il était aussi lourd de signification. Il symbolisait sa vie passé, sa courte vie en compagnie de ses "parents" -qu'Al n'avait jamais considéré comme tels-, une vie révolue.
Mais bon, ce n'était pas sur des cachotteries qu'on construisait une relation, amicale ou autre. Al prit une profonde inspiration et se tourna vers Azalée.

- Alphonse. Mon vrai prénom, c'est Alphonse Feldmann. Mais je... J'aime pas. Du tout.

- Alphonse. Mon vrai prénom, c'est Alphonse Feldmann. Mais je... J'aime pas. Du tout.

Azalée porta son regard vers lui. Elle pouvait comprendre qu'elle n'aime pas. Après tout, Alphonse, ce n'était pas très tendance ni dans le top 100 des prénoms les plus portés sur terre, mais chaque prénom à une signification et son petit côté magique. Et là, elle était tout bêtement conquise et pourtant, elle en avait aimé des prénoms vieillot voir presque carrément en voie d'extinction. Celui-là, il représentait finalement très bien le caractère du jeune homme et ça le rendait encore plus magnifique aux yeux de la jeune fille.

- Alphonse..., murmura-t-elle. C'est rare et personnellement, j'aime beaucoup. Tu ne risques pas de me comprendre, mais je trouve ça poétique comme prénom...

Elle marqua un petit temps d'arrêt pour nouer ses cheveux dans un chignon.

- Est-ce que tu sais ce qu'il signifie ?